Lettre du LAAS

Publication trimestrielle du Laboratoire
d'analyse et d'architecture des systèmes du CNRS

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En 1967, la société américaine Motorola a choisi Toulouse pour l’implantation d’une unité industrielle, aujourd’hui Freescale, la première en dehors des Etats-Unis. Les relations de l’industriel avec le monde académique ont d’emblée été naturelles mais se sont considérablement développées avec le LAAS à partir des années 80, dans le domaine des circuits intégrés de puissance. Une collaboration exemplaire s’est alors installée, donnant lieu notamment à la création de deux laboratoires communs, dont les résultats ont permis de satisfaire autant l’industriel que les chercheurs impliqués dans ces partenariats.

C'est en 1967 que la société Motorola a décidé d’implanter une unité industrielle à l’extérieur des Etats- Unis. Cette décision était particulièrement importante car il s’agissait de la première implantation de la société à l’étranger. Dans ce processus de décision, Toulouse a très rapidement été retenu pour ses capacités à répondre à la majorité des critères recherchés parmi lesquels la présence d’une université scientifique de tout premier ordre, la deuxième en France de par sa taille, capable de fournir des employés qualifiés dans une très riche pluridisciplinarité ; une situation géographique attractive, combinant la proximité de la montagne et de la mer, facilitant ainsi l’attrait de spécialistes étrangers ; enfin, les valeurs de travail en équipe, démontrées au travers de notre culture sportive bâtie autour du rugby.
Le premier directeur de Motorola Toulouse fut M. Cassignol, maître de conférences à l’INSA de Toulouse. Dans ses dix premières années d’existence à Toulouse, le site de Motorola s’est développé et a bâti de solides bases, grâce notamment à un effort de formation de ses cadres s’appuyant sur l’université toulousaine, de façon à préparer l’avenir. Ceci a permis d’étoffer ses activités dans les domaines du marketing, du « business », des laboratoires d’applications sans oublier les activités dites de « back end » telles que l’assemblage et le test de composants électroniques discrets. Ces dix premières années passées, vers la fin des années 70 et le début des années 80, Motorola a perçu l’intérêt d’augmenter ses investissements à Toulouse en déployant une activité de « front end », fabrication de plaquettes, pour produire à la fois des circuits discrets et circuits intégrés. L’arrivée de technologies complexes dans nos fabrications de tranches n’a pu se faire que grâce aux
collaborations mises en place avec le LAAS sur des domaines touchant les procédés de fabrication et les applications électroniques utilisant ces circuits. Une première étape a porté sur la formation des techniciens et cadres de la fabrication de plaquettes, en collaboration étroite avec les centres de recherche et développement de Motorola aux Etats-Unis, afin d’atteindre l’excellence en fabrication. L’année 1982 a été marquée par la confirmation de notre partenariat avec la première thèse « CIFRE », sous la direction de Philippe Leturcq, sur la thématique composant de puissance pour l’automobile avec une application dans l’allumage (remplacement des vis platinés par un commutateur électronique). Les retombés de ces travaux ont contribué à établir Motorola comme leader dans cette application en Europe.
De nombreux succès ont suivi pendant les années 80-90 avec en particulier déjà une vision sur un light ballast électronique donnant au site industriel de Toulouse l’excellence mondiale dans le développement et la fabrication de ce type de produits de puissance. En 1995, le CNRS et le Nouvel économiste ont remis le prix de la meilleure collaboration université avec l’industrie au LAAS-CNRS et à Motorola pour leurs travaux communs et nous avons eu l’honneur de recevoir ce prix des mains du prix Nobel de physique : Georges Charpak.
Forts de ces succès, les partenaires ont perçu l’intérêt d’amplifier leur collaboration. C’est donc naturellement que la décision de créer le premier laboratoire commun, le LCIP, sous la direction de P. Rossel et A. Peyre-Lavigne a été prise, laboratoire commun focalisé sur le domaine des circuits intégrés de puissance SMARTMOS pour les applications automobiles. Ces travaux ont permis l’acquisition de compétences des deux partenaires dans ces circuits, et facilité la fabrication de ceux-ci sur le site Motorola Toulouse. Depuis lors, ces collaborations ont toujours été renouvelées au rythme de contrats quadriannuels, avec aujourd’hui le laboratoire commun LISPA. Une des raisons de ces succès a toujours été dans la complémentarité des équipes et des moyens technologiques. Un des objectifs important des chercheurs impliqués dans ces partenariats était d’arriver à donner un débouché industriel rapide à toutes les innovations menées en commun. Les chercheurs du LAAS ont toujours été très fiers de pouvoir contribuer à la création d’emplois grâce à leur innovation.
Comme l’ensemble des industriels du monde de la microélectronique, Freescale est dans une révision permanente de ses stratégies avec ses équipes pour mieux affronter les marchés mondiaux. La réussite de notre société passe par l’excellence dans la mise sur le marché des nouveaux produits au niveau mondial. Nos partenaires doivent prendre en compte ces nouvelles exigences. Cela passe par le regroupement de nos équipes sur des sujets bien focalisés avec des tailles critiques et des expertises incontestables. Ces attentes vont continuer à provoquer de nombreux changements pour tous les partenaires, mais nous devons être prêts à relever ces défis.

Denis Blanc
Directeur général de Freescale France