Lettre du LAAS

Publication trimestrielle du Laboratoire
d'analyse et d'architecture des systèmes du CNRS

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Quand Jean Lagasse a créé le LAAS en 1968, l’Automatique était une science encore jeune, et son domaine s’étendait des circuits électroniques à la théorie de la commande, englobant le traitement du signal. L’Informatique prenait son essor. La Robotique était balbutiante. Le transistor remplaçait le tube à vide comme composant d’usage courant et le microprocesseur était inconnu. Pourtant, l’Homme allait atterrir sur la Lune un an plus tard. L’Espace était l’enjeu d’une course haletante entre les grandes puissances, et un formidable moteur pour la recherche scientifique. Un laboratoire d’automatique et de ses applications spatiales était donc au centre d’une problématique et d’un domaine stratégiques. Jean Lagasse a eu cette vision et a convaincu le CNRS de cette création.

Assez rapidement, la notion de « système » a émergé comme concept au centre des travaux menés au laboratoire, et l’Espace n’était plus la seule application qui motivait les recherches. Devenu Laboratoire d’automatique et d’analyse des systèmes, puis Laboratoire d’analyse et d’architecture des systèmes, plaçant comme objet de recherche la complexité à toutes les échelles, le LAAS a fortement contribué à forger au cours des quarante ans qui viennent de s’écouler, des disciplines nouvelles et à porter la science française au premier plan dans ses domaines.
Laboratoire de l’innovation scientifique, le LAAS l’a été aussi pour ce qui concerne l’organisation, le fonctionnement et l’application de la recherche. Le concept de « conseil de laboratoire » y est né. Ce que nous appelons aujourd’hui recherche partenariale s’y est conçue sous la forme originale
des « laboratoires communs recherche-industrie ». La relation privilégiée avec les industriels, grands groupes ou PME, s’est traduite par un « club des affiliés ». Alliant recherche, formation – le LAAS héberge deux écoles doctorales, accueille plus de 250 doctorants et 200 stagiaires – et
partenariat avec l’industrie, le LAAS a « inventé les pôles de compétitivité avant la lettre » comme l’avait écrit M. François Goulard, Ministre délégué à l’Enseignement Supérieur et à la Recherche, en visitant le laboratoire en 2005.
Ancré dans sa région et dans son environnement académique et industriel, collaborant avec les grands centres de recherche en Europe et dans le monde, le LAAS prépare les changements et les révolutions scientifiques de demain. Au confluent de l’Informatique, de l’Automatique, de la Robotique et des Micro et nano technologies, la conception et la réalisation de nano-structures et de nano-robots sont désormais dans le champ de projection des travaux de recherche d’aujourd’hui. Les perspectives sont immenses dans de nombreux champs applicatifs, comme la santé, l’environnement, ou les transports, et le rapprochement avec les sciences du vivant ou la biochimie ouvre la voie à des recherches interdisciplinaires fécondes. Le déploiement de nanoobjets impose de traiter conjointement toutes les problématiques de perception, d’actionnement, de communication, de mise en réseau, d’autonomie, de résilience des systèmes. Il faut repenser les principes et les théories dans plusieurs domaines. Voilà qui fonde le programme de recherche du LAAS dans les prochaines années. Un programme autour duquel le LAAS et ses partenaires confirmeront l’adage de Jean Lagasse : « Toujours plus haut, toujours plus loin dans la créativité et le bonheur d’être ensemble ».

Raja Chatila
Directeur du LAAS