Réseaux et applications autonomes

L’objectif est de concevoir les méthodes permettant aux réseaux et aux applications de réagir aux événements adverses et aux fluctuations de la demande de manière autonome, c’est-à-dire avec une intervention humaine minimale.


Pour les réseaux de communication, l’autonomie est un défi clef de grande priorité, à la fois pour la communauté de recherche et pour les acteurs industriels et les groupes de travail internationaux qui les associent. On peut retrouver ce terme sous différentes nomenclatures comme le groupe de travail ETSI « Zero touch network & Service Management (ZSM)» [Sprecher'2018] ou le concept du self-driving networks [Jacobs'2018].

Dans ce contexte, les verrous que nous considérons sont liés à la prise en compte conjointement et de façon cohérente des propriétés (ou exigences) fonctionnelles (génériques pour différents domaines ou pour un domaine donné, ou spécifiques à la mission) et non-fonctionnelles (confidentialité, sécurité, qualité de service, coût en consommation d’énergie ou en budget) des systèmes. Les défis concernent la gestion de l’adaptation dynamique (en phase d’opération) des systèmes aux variations des exigences fonctionnelles et non fonctionnelles, et aux changements des contraintes de l’infrastructure de déploiement (comme pour les environnements hybrides de type IoT/M2M, Fog Computing, 5G, et satellite). Il s’agit par exemple, de tenir compte des exigences de confidentialité des données privées pour les traiter localement, tout en considérant les contraintes des ressources de traitement (par exemple, gateways). La répartition des tâches doit alors se faire de façon compatible avec ces exigences et contraintes. L’utilisation des techniques d’apprentissage et de raisonnement automatiques est à la fois une opportunité que nous pouvons exploiter et une difficulté que nous devons résoudre. Il faut aussi gérer les conflits entres les actions d’adaptation pouvant résulter des décisions locales contradictoires entre les sous-systèmes composant le système global. Il faut également garantir la cohérence de la séquence globale (voire du workflow d’orchestration) des actions d’adaptation locales dans un contexte de partage et de composition de ressources distribuées. L’élaboration d’approches de conception, de modélisation et de vérification et validation de règles (ou de façon plus générale de politiques et de stratégies) de gestion de l’adaptation est un objectif clef de notre prospective dans le domaine de l’autonomie des systèmes informatiques critiques. Les verrous sont liés à l’élaboration des modèles cognitifs, architecturaux, comportementaux, et d’optimisation qui soient vérifiables à différentes échelle et exécutables de façon distribuée. L’absence de connaissance initiale ou globale ou l’incertitude sur le comportement des systèmes en phase de conception et l’émergence de comportements inattendus (non désirés, auxquels il faut faire face, notamment) en phase d’opération rendent les techniques actuelles inadaptées ou insuffisantes. L’apprentissage supervisé si important pour la détection des anomalies (menaces de sécurité ou dégradation imminente de performance ou de qualité de service en général) devient non utilisable dans le contexte des futurs systèmes. Les techniques de type apprentissage profond par renforcement, distribué, et explicable sont à développer. Des abstractions de haut niveau pour la conception, de gestion et de vérification sont nécessaires pour la mise en œuvre de solutions sûres utilisables pour les futurs réseaux de communication.

[Sprecher'2018] N. Sprecher, IEEE Softwarization, November 2018 ETSI ZSM Architectural Framework for End-to-End Service and Network Automation. https://sdn. ieee.org/newsletter.

[Jacobs'2018] A. Jacobs et al. Refining Network Intents for Self-Driving Networks. ACM SIGCOMM Computer Communication Review (CCR) 2018.