Lettre du LAAS

Publication trimestrielle du Laboratoire
d'analyse et d'architecture des systèmes du CNRS

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© LAAS-CNRS/Alain Estève

Une méthode originale de traitement chimique de la surface de silicium ouvre une nouvelle voie pour le contrôle des interfaces complexes en nano et nanobiotechnologies silicium. La méthode proposée suggère que de telles surfaces, greffées avec une précision de l’ordre de l’atome, offrent une large palette de fonctions possibles. Ces greffages permettront de déposer, avec un contrôle accru des interfaces, des matériaux inorganiques (métaux, oxydes…) pour les étapes de fabrication des transistors de demain. La méthode pourra également s’appliquer aux biotechnologies, par exemple pour la croissance de polymères utilisés dans la fabrication des interfaces pour les biopuces et les laboratoires sur puces, ou encore pour le greffage de biomolécules (protéines ou ADN).

La méthode permet l’accrochage et la répartition spontanée, ordonnée et réversible de fonctions chimiques particulières sur cette surface. Jusqu'ici, la maîtrise des surfaces de silicium pour des applications en nanotechnologies se heurtait à l'incapacité de disposer de surfaces fonctionnalisées reproductibles et contrôlées. La propriété de la surface de silicium de se couvrir d’atomes d'hydrogène, lorsqu'elle est exposée à du fluorure d’hydrogène (HF), est connue. On l’utilise couramment en microélectronique pour nettoyer des surfaces de silicium avant de procéder aux phases de dépôt ou de croissance. La méthode proposée ici montre pour la première fois qu’en suivant ce même procédé, on peut aussi stabiliser des terminaisons fluorures (Si-F) dans la mesure où la surface a été préalablement traitée au méthanol. En effet, exposée à cet alcool, 30 % de la surface se recouvre de fonctions méthoxy (O-CH3) de manière homogène. Ceci est lié à la rotation propre de la molécule une fois greffée qui, en tournant à la manière de pales d’hélicoptère, protège les sites de surfaces sous jacents qui demeurent hydrogénés. Ainsi positionnées, les fonctions méthoxy vont réagir préférentiellement avec des molécules HF contenue dans une solution et seront remplacées par des liaisons Si-F. Une nouvelle exposition au méthanol entraîne un retour à une surface méthoxylée. L'étude montre que l'on peut également remplacer les atomes de fluor par des fonctions hydroxy OH très réactives dans le cas où la surface fonctionnalisée Si-F est exposée à l'eau.

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© LAAS-CNRS/Alain Estève

Ces divers processus sont réversibles. Au-delà des fonctions précédemment citées (F, O-CH3, OH), d’autres fonctions organiques très variées pourront être greffées. Ajoutons que la répartition des fonctions chimiques « à façon » à la surface s’accompagnera d’un contrôle précis de la densité d’accrochage, la taille des fonctions alcools permettant d'ajuster la taille des « pales d'hélicoptère ».

Ces travaux ont été réalisés en collaboration avec le Laboratoire de modification de surface de l'Université de Rutgers, Etats-Unis